Interview Marianne BERGEONNEAU : réalisatrice et directrice artistique

Marianne Bergeonneau, ancienne élève de l’Ecole des Nouvelles Images, porte désormais deux casquettes : celle de réalisatrice chez Xilam Animations et celle de directrice artistique dans le domaine des jeux de rôle. Découvrez son parcours, ses deux métiers et ses conseils dans cette interview !
Bonjour Marianne, pour commencer, peux-tu te présenter ?
Bonjour! Je suis sortie de l’ENSI en 2021, cela ne fait pas si longtemps mais je peux partager mes premières expériences! Je suis actuellement réalisatrice chez Xilam, un studio basé à Paris, Lyon et Angoulême. Nous avons entamé la pré-production de mon nouveau court-métrage et fait des demandes de subventions. Mais en attendant de pouvoir débuter la production, je suis actuellement directrice artistique pour des jeux de rôle chez Black Book Editions.
Si tu le veux bien, faisons un zoom sur ton métier de réalisatrice avant d’aborder ta seconde casquette…
J’étais dans l’équipe du film “Wet” et suis très heureuse d’avoir pu jouer entre autres le rôle de DA sur notre film de fin d’études. L’année n’a pas été de tout repos mais nous a permis de faire un film qui nous plaisait autant au niveau du ton que du visuel et ce travail d’équipe nous a beaucoup rapprochées. Lors du jury de diplôme, notre film a particulièrement retenu l'attention de Marc Du Pontavice, le président du jury, qui m'a par la suite proposé de réaliser mon premier court métrage professionnel.
Il m’a d’abord fallu élaborer un concept initial et faire valider mon nouveau projet en présentant de nombreuses illustrations à Marc. J’ai ensuite pu collaborer avec les artistes et techniciens de Xilam et Cube qui m’ont aidée à créer une animatique préliminaire. Avec l’aide de Lucie Bolze, nous avons monté des dossiers techniques et artistiques et sommes actuellement en phase de recherche de financements.
Si nous arrivons à réunir le budget, je me concentrerai pleinement sur la réalisation détaillée du film. J’espère pouvoir travailler à nouveau avec les filles de la team Wet, si nous sommes toutes disponibles, nous aimerions reformer l’équipe en ayant le renfort des équipes de Xilam et Cube pour réaliser un film deux fois plus long que “Wet”.
Concrètement, sous quels types de contrat travailles-tu ?
Actuellement, j'explore divers modes de travail. Lorsque je travaillais sur la modélisation 3D de figurines de jeu de plateau, j'étais en contrat à durée déterminée dans une entreprise de jeux, où le statut d'intermittent n'était pas applicable.
Pour mon projet de film, j'ai été engagée pour une courte période, principalement pour réaliser des storyboards. Cette prestation a été rémunérée sous forme de droits d'auteur. Étant donné que je n'avais pas cotisé en tant qu'intermittente, cette courte période n'était pas significative pour mon statut. Cependant, une fois la production lancée, je devrais adopter le statut d'intermittente.
Depuis plusieurs années maintenant, je travaille également en tant que freelance que ce soit pour des illustrations, de la 3D ou la direction artistique. Bien que cela implique une gestion administrative conséquente, c’est tout à fait possible de jongler entre différents statuts !
Quelles sont les qualités requises pour réaliser, concevoir des films ?
Je pense que la sensibilité et la curiosité sont essentielles à notre métier (et à la création en général) mais il faut également développer une bonne communication. Il est important de donner envie aux gens de travailler avec soi dans cette direction en se montrant à l’écoute et adaptable, tout en gardant la ligne directrice du projet bien en tête.
La réalisation implique souvent de nombreux storyboards, je pense qu’il est nécessaire d'être flexible et de trouver des solutions créatives pour donner vie à des scènes impactantes tout en respectant le budget. Pour moi, le dessin demeure l’outil le plus crucial, il permet de tout dire en une image, de convaincre un·e producteur·ice et de se reprendre un millier de fois pour un minimum de temps et d’énergie.
Qu'est- ce qui vous plaît le plus dans ce métier ? Et à l'inverse, quels sont les plus gros défis ?
Concernant les défis, l'instabilité professionnelle en est un ! Bien que Xilam me rémunère pendant la production et une partie de la préproduction, il y a des périodes d'attente pour les financements où je ne suis pas rétribuée. Il faut donc pouvoir trouver du travail tout en ayant à l’esprit de possibles dates de début de prod qui changent assez régulièrement. Il y a également la gestion du stress et de nombreuses remises en questions.
Ce qui me passionne, c’est la possibilité de réaliser un film qui me parle, dans lequel je peux transmettre mon univers et des sensations. L'animation est souvent associée à un public jeune, particulièrement dans le domaine de la 3D et j’ai l’opportunité de faire à nouveau un court métrage d’animation destiné aux adultes. Marc m’a permis de développer un film avec une grande liberté créative et je pense que nous avons tous·tes hâte de donner vie à cette histoire et de nous amuser avec des personnages cyniques et surréalistes.
Bien que ma formation m'ait apporté des compétences en 3D, je me considère davantage comme une directrice artistique que comme une technicienne. La 3D m’a permis de rentrer dans ce domaine mais n’est pas un but en soi, j’ai pas mal de projets en tête qui, j’espère, verront le jour sous différentes formes, dans différents médias.
La transition est parfaite : à côté de ce travail, tu es à la direction artistique de jeux de rôle. Est- ce que tu peux détailler cette activité ?
J'ai eu l'opportunité de collaborer avec Black Book Editions, une maison d'édition spécialisée en jeux de rôle, où j'occupe actuellement le poste de directrice artistique. Dans ce rôle, ma responsabilité principale est de sélectionner des artistes et de superviser la production d'illustrations pour les histoires créées. Cela inclut les couvertures, les personnages, les créatures et autres scènes, tout en veillant à maintenir une cohérence graphique dans la production des livres.
Le jeu de rôle est une passion que j'ai découverte avec mes amis à l’ENSI et nous avions l'habitude de nous retrouver pour dessiner ensemble nos propres personnages et illustrer des scènes que nous avions jouées. Après une séance d’enregistrement de voix, j'ai eu l’occasion de discuter de cette passion avec notre intervenant Julien Dutel et ai découvert qu’il travaillait à Black Book Editions en tant qu’auteur. C’est finalement quelques années plus tard grâce à ses recommandations que j’ai eu l’opportunité de travailler dans ce domaine (de niche avouons-le) d’abord pour réaliser des figurines en 3D et maintenant en tant que DA.
Comment s’appellent les jeux sur lesquels tu travailles en ce moment ?
Le plus gros projet est la deuxième édition du jeu "Chroniques Oubliées Fantasy" pour lequel nous avons décidé d’adopter une direction très colorée et de montrer de la diversité autant dans les corps que dans les caractères des personnages. Parallèlement, je travaille sur plusieurs autres projets, dont certains restent confidentiels pour le moment. Mais la boucle est bouclée puisque je fais la direction artistique des prochains livres de “Rôle’n Play” écrits par Julien Dutel!
Et pour terminer, est- ce que tu aurais un conseil pour les étudiants ou les jeunes des moins jeunes qui cherchent leur chemin ?
Pour celles et ceux qui aspirent à la réalisation, c’est un métier passionnant dans lequel on peut donner vie aux histoires les plus folles, et creuser les thématiques qui nous sont chères, mais je conseille de ne pas trop l’idéaliser pour ne pas être déçu. Il faut souvent adopter une vision pragmatique, la réalisation d’un projet peut durer de nombreuses années voire ne jamais aboutir. C’est beaucoup de temps et de travail personnel rarement rémunéré avant la production.
Maintenant si en connaissance de cause vous êtes toujours partant·e·s, faites des projets personnels, créez un maximum de votre côté! Il est possible de débuter par des projets modestes, de participer à des résidences ou même de commencer comme technicien dans un studio qui propose à ses artistes de pitcher des projets et avoir des opportunités de réalisation. Et puis ne pas hésiter à être curieux·ses et parler aux ami·e·s, collègues, intervenant·e·s de sujets qui les passionnent, ça peut donner des idées et peut être des opportunités de travailler ensemble plus tard!
Et surtout dans un travail d’équipe comme celui là, le plus important reste .. eh bien l’équipe! Bien entouré·e·s, on apprend énormément et c’est un plaisir de travailler sur à peu près n’importe quel projet, qu’il aboutisse ou non.
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